vendredi 11 novembre 2011

Un nouveau 11 novembre contre le droit à l'histoire.



Une fois de plus, le pouvoir lance sa polémique avec une légèreté qui ne saurait cacher le caractère primitivement vicieux de ses propositions.


En effet, le gouvernement devrait proposer de créer un « memorial day » à la française, dédiée à « ceux qui ont donné leur vie à la France », tués au nom de la patrie, et non plus à une guerre, ses victimes et à sa résolution.

On ne peut, par principe, qu'admirer le courage de ceux qui tombent au service d’un intérêt supérieur. Cependant, peut-on, avec ce seul argument, ne pas distinguer un militaire professionnel d’un autre d’infortune, qu’il soit résistant ou mobilisé? Alors même que celui-ci soit impliqué dans des conflits aux causes et aux finalités diverses? Ne pas faire de différence entre les opérations extérieures (légales ou non), les conflits mondiaux, les guerres civiles… reviendrait à délaisser l’histoire dans ce qu’elle peut apporter au présent notamment concernant la préservation de la paix par l’élimination des causes de la guerre.

Il faut avouer que pour les intérêts et le système dont le gouvernement est le défenseur, une réécriture de l’histoire enlèverait un poids, qu’ils n’avaient pourtant pas l’air de si mal supporter :

Pour les seules pertes militaires : 8.538.315 morts répartis entre la Russie, l’Empire Britannique, la France, l’Italie, les USA, le Japon, la Roumanie, la Serbie, la Belgique, la Grèce, le Portugal, le Monténégro, l’Allemagne, l’Autriche Hongrie, la Turquie, la Bulgarie et plus de 13.000.000 civils tués.


Quelles causes pour ces conséquences?


Voyons ce que disent les rares socialistes qui n’ont pas cédé à l’appel des canons de leur pays respectif, lors de la conférence de Zimmerwald (1915) :


« La guerre actuelle a été engendrée par l'impérialisme. Ce stade, atteint par le capitalisme, est son stade suprême. Les forces productives de la société et l'importance du capital ont grandi au-delà des limites étroites des différents Etats nationaux. D'où la tendance des grandes puissances à asservir d'autres nations, à conquérir des colonies, en tant que sources de matières premières et débouchés pour l'exportation des capitaux. Le monde entier devient un organisme économique unique ; le monde entier est partagé entre une poignée de grandes puissances.
 Les socialistes, qui aspirent à libérer le travail du joug du capital et se font les champions de la fraternité universelle des ouvriers, luttent contre toute forme d'oppression et d'inégalité en droits des nations.
De la part des deux groupes de puissances belligérantes, cette guerre est une guerre d'esclavagistes pour le maintien et le renforcement de l'esclavage : pour un nouveau partage des colonies, pour le « droit » d'opprimer d'autres nations, pour les privilèges et les monopoles du capital impérialiste, pour la perpétuation de l'esclavage du salariat par la division des ouvriers des différents pays et la répression réactionnaire de leurs aspirations. »


L’impérialisme est aujourd’hui une cause qu’aucun historien ne peut écarter. Cette même cause qui s’avère être une conséquence du capitalisme.


En mettant tous les « morts pour la France » dans le même cercueil, et en revenant sur la loi du 24 novembre 1922, célébrant la Paix, ce « memorial day » à la française ne serait que l’expression chauvine du droit de la bourgeoisie française à disposer du peuple de France et de son histoire.




Gauthier LORTHIOIS.